Lundi de la malchance

15 février 2016

Lundi de la malchance

Bien le bonjour,

Déjà au réveil ce matin, je n’avais qu’une envie : dormir et me réveiller le lendemain. Mais bon, il y a des choses comme le travail qui ne savent pas attendre.

6h15′, tentative.

Tout le long du trajet de la maison jusqu’au rond-point de la douane adidogomé, j’avais l’impression qu’un fantôme me suivait et que je devais faire attention. L’intuition !

J’arrive dans les environs du quartier Avé-maria quand un chauffeur de Nissan Qashqai sort sa tête, regarde quelques minutes dans son rétroviseur et envoie une grosse mucosité évacuée par sa bouche. L’incivisme !

Le liquide défiant les lois de la physique, et emporté horizontalement par le vent, prend la direction de nous autres conducteurs derrière la voiture. Mouf ! On aurait cru qu’on avait un aimant sur nous qui l’attirait. L’aimant de la malchance. Défiant les lois de l’équilibre comme Michael Schumacher, j’évite une grande partie du liquide qui finit par atterrir sur le visage du zémidjan qui était juste derrière moi. La petite partie réussie quand même à se loger sur ma chemise.

Je fais un arrêt rapide, après des difficultés à me frayer un chemin dans la circulation, devant le gros baobab en face de l’entrée Kouvahey. (Petite parenthèse… Les Togolais n’aiment pas céder le passage. Je ne comprends pas cette attitude. Vous pouvez être coincés en plein milieu d’une voie, personne ne vous cède. Vous pouvez vous engager en sortant d’un angle d’une rue, personne ne vous cède. Quitte à vous faire tamponner par un gros camion, on s’en fout. Tout le monde est pressé. Conséquence : il y a du forcing par moment dans la circulation.) Evitant de nombreux télescopages, je me procure un sachet de pure water et à l’aide d’un papier mouchoir, j’essuie le crachat.

6h45′, confirmation de la poisse.

Je reprends ma route jusqu’au rond-point Nyékonakpoè près de la station d’essence total où à mon arrivée le feu tricolore était sur orange. Comme les autres conducteurs à ma gauche, je passe. Subitement un bâtard sort de nulle part, se faufile dans la circulation mais ne réussit pas à arrêter les deux taxis. Dans un geste acrobatique, il se retourne vers moi pour m’intimer l’ordre de serrer. Je m’arrête pendant que les autres motos me dépassent.

Moi : monsieur, il y a quoi ?

Lui : violation de feux tricolores.

Moi : violation comment ?

Lui : violation, c’est violation. Ça fait 5.000fr + carte d’identité + pièce de la moto.

Moi : mais mais mais, vous êtes sérieux ? Je n’ai commis aucune infraction, monsieur. C’est de l’abus !

Lui : tu veux m’apprendre à faire mon travail ? D’ailleurs, donne les clés. On se voit à BM.

Moi : Brigade Motorisée ?

Le temps que je me retourne vers son collègue qui me parlait, le bâtard démarre ma moto et se dirige vers une destination inconnue. J’attrape le premier zémidjan qui passe et je le suis. Il nous fait faire le tour de Déckon avec mon pauvre carburant d’étudiant avant de revenir au rond-point de l’ancienne direction de la Lonato et gare ma moto dans le coin de Lang Center. Sorcellerie ! J’ai eu le temps d’expliquer au zémidjan la situation. Ce dernier m’a demandé de le laisser négocier.

Le zémidjan se dirige vers le bâtard qui lui dit d’un ton menaçant que je suis récalcitrant et impoli. Que j’aurai pu partir plus tôt si je parlais le même langage que lui. Au lieu de ça, je lui parle gros français avec des expressions d’intellectuels. (Infraction et abus, sont devenus des gros mots ? Okay) Les deux hommes discutent en messe basse pendant une dizaine de minute. Le zémidjan revient vers moi et me demande de lui donner trois mille francs. Je lui dis : c’est de la corruption. Je ne donne rien. Il me dit que le bâtard a juré de me faire perdre ma journée et m’explique que c’est parce que je suis en chemise pagne, qu’il a déjà calculé ma poche. L’apparence hein… Je regarde ma montre, il est presque 8h. Je fais le têtu les 5 minutes qui suivent puis, ma témérité se heurte à la dure réalité : le retard d’un stagiaire un Lundi matin est mal vu par son employeur. Je sors mon portefeuille et je lui remets toute ma fortune, deux mille francs. Ao… ! :'( Il va voir le bâtard et revient vers moi avec ma clé de moto. Il prend soin de me dire : remets-moi ma part maintenant, frère. Donc le type n’a pas pitié de moi ? Il veut une prime de négociation ? La solidarité est morte ! Je lui remets le reliquat, les quelques pièces que j’avais pris après avoir acheté du carburant en quittant la maison.

Non seulement je suis arrivé en retard au service mais je suis obligé de faire un carême forcé. Si vous apprenez un jour que je suis en prison, ne cherchez pas loin. C’est certainement pour avoir cassé la gueule ou pour avoir donné un coup de poing à un policier bâtard, une bande de corrompus.

Bonne semaine de travail.

Bien à vous !

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Commentaires

kudeabo karl
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Yako frère. Pas de bol. Il ya de ces matins comme ça. Comment tu vas prendre pour faire? Les "batards" lol