Le LMD, l’UE libre et moi

Article : Le LMD, l’UE libre et moi
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30 juin 2017

Le LMD, l’UE libre et moi

30 Juin 2011, Université de Lomé, dalle de la Cité C. Il était presque 18h, quelques individus traînaient encore leur corps fatigués sur le dur sol en ciment. Soi-disant ils étaient en train de faire des exercices physiques. Parmi ces individus, il y avait moi, Francius, Cédric et Edem. Le but de cet exercice nocturne ?  Valider des UE libres (UE – Unité d’Enseignement) grâce au cours de taekwondo.

Ma génération a eu l’affreuse malchance de subir nerveusement le système LMD à ses débuts. Elle a payé le lourd tribut d’un système aussi instable que l’étiquette politique d’Agbéyomé Kodjo. Nos professeurs savaient bien que nous n’avions, à l’époque, ni les ressources humaines, ni les moyens financiers, ni les stratégies appropriées, mais ils nous l’ont imposé quand même. Le système classique qui permettait de valider son année en s’appuyant sur une juste compensation devait disparaître. Il devait laisser place au système de validation unique des matières. C’est là que sont apparues les UE libres. Elles n’étaient pas aussi libres que le suggérait l’adjectif. Pas libre du tout… Il fallait, au contraire, bien suer ou même se blesser pour avoir les 3 points de crédits qui manquaient aux 57 crédits afin de valider son semestre. Les études étaient devenues subitement violentes. Les étudiants curieux que nous étions, en lieu et place de l’espagnol ou de l’allemand, nous sommes allés nous inscrire au cours de taekwondo. On voulait apprendre quelque chose de nouveau. Erreur !

Le taekwondo est un art martial avant tout. Ne pratique pas le taekwondo qui veut, mais qui peut. On l’a appris à nos dépens. La voie du pied et du poing (c’est sa traduction littérale), on l’a compris au premier cours. Aussitôt arrivé, aussitôt impliqué. Il fallait faire des pompes sur des poings fermés. Et on pouvait entendre de loin : ana, toul, set, net puis silence. Le coach, un bolo jamais souriant de la quarantaine est venu nous intimer l’ordre de sortir des rangs, nous ranger à côté pour faire 30 pompes. On était punis. On a repris malgré nous : ana, toul, set, net, tasot, yosot, ilkop, yodol, ohop, yol. C’était chaud !

Bref… Le prof avait compris qu’on était des aventuriers. Il fallait soit nous motiver à y rester, soit nous faire désister. Il nous a raconté que le but des arts martiaux est le contrôle de soi. Les techniques de casse sont très importantes. Le taekwondo, c’est pour les gens frêles comme une guêpe. Les coups de pieds hauts sont inutiles, etc… Les balabla qu’on dit aux débutants !!!

Un mercredi soir, alors qu’on était en fin d’année académique, un camarade avec un grade plus élevé s’est essayé à faire des exercices avec nous. Il a choisi pour adversaire un gars au milieu, un mec dur comme le teck, un jeunot raide comme un piquet. Ao… Ce jeunot, c’était moi. Après l’exercice pénible de grand écart, je ne sentais plus mes jambes. Avant même que le prof ne siffle le début de l’exercice suivant, j’ai senti un violent coup de pied dans mon ventre. Misère ! C’était un complot contre ma personne. Et par ricochet contre tous les aventuriers.

Je venais de me faire frapper par un nerveux. Je n’avais jamais connu de douleur aussi atroce. J’ai décidé, depuis ce soir-là, que je ne m’aventurerai plus à valider quoique ce soit en prenant le risque de me fracasser le crâne ou de découvrir des maux de bas-ventre atroces à cause d’un coup de pied mal placé. C’était sans compter sur mon envie de valider mes deux semestres. J’ai poursuivi les cours avec une prudence excessive jusqu’aux évaluations qui m’ont permis d’en finir. Je n’ai pas perdu l’envie d’en apprendre davantage, en m’inscrivant à un autre cours au Lycée technique. Mais les exercices violents des senseis, ceux qui étaient là avant moi, m’ont dissuadé.  J’ai compris avec du recul qu’il ne sert à rien d’essayer d’enlever de force un manteau à un homme. Faites-en sorte qu’il ait chaud, il l’enlèvera de lui-même.

Ce matin, 6 ans après, alors même que ce souvenir me revenait, j’ai vu le prof de taekwondo en circulation. Il s’est amusé à me demander : est-ce que tu veux gné bras ? J’ai répondu à haute et intelligible voix : JAMAIS !

Bon weekend, chers tous !

 

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Commentaires

wamo
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Le Taekwondo, moi qui y pensait. Je ne vais donc pas m'y aventurer. Excellent billet.

Guillaume DJONDO
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C'est une bonne discipline. Tu peux combiner exercice physique et point. C'était moi mon but. Faire du sport tout en validant mon parcours. Mais ça c'était avant de me rappeler que j'avais un corps dur comme le cur dent de tchamba.

Bien à toi !