Joutes verbales francophones en toute liberté à Lomé
Samedi 19 mars, le concept du #LibresEnsemble s’est manifesté sous sa forme la plus simple, dans un concours de joutes verbales francophones à Lomé. Ce concours a embrassé à la fois la diversité, la solidarité, la fraternité et la liberté. La grande salle agora Senghor de la médiathèque Saint-Jean fut le témoin d’une scène pas comme les autres. Des étudiants, rassemblés par petits groupes de quatre, représentants les différentes universités du Togo, se sont affrontés dans un concours de joutes verbales dans le cadre de la célébration de la journée internationale de la francophonie. C’était la première édition d’un concours rassemblant les meilleurs représentants des universités du pays, dont le thème était le développement durable.
Les étudiants avaient abandonné leurs tenues universitaires pour porter des toges de parlementaires. Deux équipes de quatre candidats se sont affrontées à tour de rôle sur un sujet tiré au hasard. L’une des équipes, incarnant la majorité parlementaire, devait défendre une idée par l’affirmative et l’autre équipe, l’opposition, devait défendre cette même idée par la négative. Pendant trois heures, toute l’agora Senghor a vibré à l’écoute des arguments avancés par les équipes finalistes, les propos étaient forts, la joute verbale était de haut niveau. Citations, répliques argumentées, déstabilisation, tentatives de dénigrement, tacles verbaux… quelle prouesse ! Le spectacle d’un débat époustouflant a séduit toute la salle.
Les thèmes étaient variés, cela portait aussi bien sur l’égalité homme-femme comme condition sine qua non pour une lutte efficace contre le VIH-SIDA, que sur la voiture du futur ou l’emploi vert dans le secteur informel ou encore l’idéal utopique ! Ces thèmes ont motivés les différents groupes qui ont offert aux spectateurs des débats aux allures de pugilat oratoire. Ce qui a marqué l’assistance et le jury c’est d’abord la réactivité des participants (des réponses faites au tac au tac), mais aussi les attaques toujours pertinentes et la dévalorisation en règle des prestations des adversaires lorsqu’une équipe se montrait plus faible. Cette partie du concours a donné des frissons a beaucoup d’entre nous, spectateurs, qui ne sommes pas habitués aux attaques, souvent dures, parfois gratuites, touchant les candidats en plein coeur. Des mots et des expressions auxquels on ne s’attend pas dans la bouche d’universitaires nous ont frappé et ont pris vie dans ce concours, par exemple : « débauche », « perversité », « ressaisissez-vous », « vous êtes lents à comprendre », « vous êtes ridicule », « vous rêvez ! », « descendez de votre nuage, revenez sur terre » etc. Le public était parfois choqué, il est vrai que les réponses peuvent paraître étonnantes, à la limite de l’insulte. Mais, c’est dans une ambiance fraternelle que les candidats se retrouvaient dès le coup de sifflet final, c’est ça le jeu de la joute verbale ! Chers concurrents, attention, pas de complaisance dans les mots.
Ce concours m’a enchanté, j’y ai vu un véritable élan de liberté. J’ai aussi été marqué par la parité dans la composition des équipes, tous les groupes étaient composés de deux filles et de deux garçons. Il y avait des chrétiens et musulmans, on pouvait les distinguer par leur habillement (voile, foulard, écharpe), mais peu importe, chacun était libre d’être comme il est. Il y avait aussi une grande liberté de rôle au sein de chaque équipe. Le représentant d’une équipe qui se sentait inspiré par une précédente intervention pouvait intervenir à la place d’un autre. Chacun l’écoutait, derrière le jeu des mots il y avait un grand respect entre eux. Leurs interventions étaient de haut niveau, c’était impressionnant, le discours était bien structuré, les citations étaient belles, il y avait une certaine prouesse intellectuelle et une liberté de ton qui m’ont impressionnés. Grâce aux mot il y avait une vraie liberté. Le jury a annoncé que les représentants de la Francophonie avaient décidé d’offrir des prix de consolation aux équipes recalées en demi-finale, alors que ce n’était pas prévu au départ. Mais leur prestation avait été tellement séduisante de ces derniers méritaient une récompense. J’ai bien aimé ce prix inattendu. Mais ce que j’ai le plus aimé c’est de voir que les concurrents, qui s’étaient affrontés individuellement dans ce concours se sont retrouvés à la fin de la soirée pour partir ensemble à la fin du concours.
Le concept du #LibresEnsemble a dominé toutes les actions de ce concours et a montré toutes ses facettes à un public qui n’avait pas l’habitude d’une telle aventure. Cette première édition du concours de joutes verbales francophones a prouvé que l’on pouvait encore s’évader de son quotidien et rêver un moment d’un avenir meilleur pour son pays. Le concours de joutes verbales francophones a démontré que malgré nos origines multiculturelles nous pouvons nous asseoir et débattre ensemble sur des sujets brûlants d’actualité. Le concours de joutes verbales francophones a révélé la grandeur d’esprit, la maturité et le talent de nombreux étudiants. Ce concours a le mérite de mettre en lumière une réalité : la jeunesse togolaise peut s’épanouir ailleurs que dans l’alcool, la drogue et la médiocrité. L’éducation donne à la jeunesse la possibilité de s’épanouir avec des idées. Il existe bel et bien une partie de la jeunesse qui est consciente que l’avenir ne se prépare pas tout seul ou sur un coup de tête. Il se prépare sur le long terme, grâce aux études, à la recherche de la connaissance, à la réflexion. Cela nécessite parfois des sacrifices mais pour un bénéfice tellement enrichissant : la culture, les idées, la réflexion !
A l’issue d’un affrontement très serré, l’équipe de la faculté de Droit a été élue championne de ce concours dépassant juste de quelques points l’équipe de la faculté des Lettres.
Ce concours de joutes verbales francophones a prouvé de la façon la plus élémentaire que nous sommes #LibresEnsemble et que nous pouvons rester #LibresEnsemble.
Bien à vous !
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