Des filles et de la vantardise

5 septembre 2015

Des filles et de la vantardise

Jeudi, il est 7 h 30. Me voici empilé dans un bus Rakieta en direction de Kara. Mince ! 410 km d’inconfort hein ?

Devant moi deux dames kotocoli, le cure-dents dans la bouche, mais bavardes comme deux adolescentes pré-pubères, et un monsieur balafré, qui s’y mêle de temps à autre, sans doute, un Kabyè. Comment je sais ? L’expérience !

Assis directement derrière eux, j’étais à l’extrême gauche, à l’extrême droite, il y avait un jeunot mignon comme le soleil à midi. Au milieu de nous deux, une demoiselle, belle comme la Citroën qu’aurait gagnée notre Miss Kpévica, Stéphanie du Bois si elle n’avait pas dit ce que nous savons tous (première dauphine du concours Miss Togo 2015). Tout le long du trajet, elle avait le visage fermé et la tête plongée dans son téléphone. Moi, j’avais compris qu’elle ne voulait pas être dérangée, mais l’autre gars à sa droite semblait ne pas décrypter les signes d’un volcan verbal mis en veille.

10 h 10, premier arrêt à Agbonou, Atakpamé. Pendant que les autres passagers se précipitaient pour descendre, le gars voulant profiter de l’absence du regard des passagers se retourna vers la fille pour engager la discussion.

Lui : bonjour ma chérie.
Elle : bonjour. Il y a quoi ?
Lui : je voulais…

Il n’a pas fini sa phrase que la demoiselle répliqua.

Elle : tu me veux quoi ? On se connaît ?
Lui : … (silencieux)
Elle : alors tu ne parles plus ?
Lui : excuse-moi.

Euye ! Douche froide hein ? Avant que je ne retourne la tête pour prendre connaissance de la situation, le gars est descendu du bus à la vitesse de la lumière. Je l’ai vu s’acheter un papier mouchoir et s’essuyant ces quelques gouttes de sueur sur le front provoquée par la chaleur du volcan sortie de la bouche de la fille.

10 h 20, reprise du trajet. Pendant que mes écouteurs me servaient « ça fait mal » de Singuila, j’ai pensé à la honte que la demoiselle venait de mettre sur le genre masculin. C’est quelle vantardise ça ? Ma fierté de digne fils d’Aného s’est vu écorchée. J’ai senti ma salive âcre, j’ai eu un goût de tristesse. Mon ego m’a susurré « tu vas laisser faire ça » ?

14 h 10, second arrêt à Sotouboua. Moment de vengeance.
La fille est descendue comme tous les autres passagers en quête d’un peu de soulagement. Soit au niveau de la gorge sèche, soit au niveau du ventre creux, soit au niveau des fesses chauffées par le nylon du siège, soit au niveau des muscles du genou contracté. Je me suis dirigé vers elle…

Moi : vous êtes jolie.
Elle : merci. Je sais. Et puis quoi ?
Moi : bien le bonjour.
Elle : bonjour.
Moi : comment vous ressemblez à Cina Lawson comme ça ? C’est une proche ?
Elle : la ministre du Commerce ?
Moi : non. La ministre des Postes et de l’Economie numérique. D’ailleurs, elle a lancé le concours sur les applications innovantes togolaises le 1er septembre dernier. Et ça court jusqu’au 15 novembre 2015.
Elle : aaaaaaaaaaah. (avec un air d’étonnement)
Moi : oui. Alors c’est une parente à vous ?
Elle : non, pas du tout.

14 h 20, reprise du trajet. Nous sommes montés dans le bus pour les dernières minutes du voyage. J’ai remarqué qu’elle me fixait par moments. A peine j’ai tourné mon regard vers elle qu’elle me tendit la main. Pendant que j’empoignai sa main pour la saluer, elle engagea la discussion.

Elle : on m’appelle Octavia. Je suis responsable suivi et évaluation à Plan-Togo, consultante auprès de Ogar assurance.
Moi : je suis Guillaume. Juriste de formation, et blogueur.
Elle : Guillaume Djondo ?
Moi : … (j’esquissai un sourire, puis je hochais la tête pour acquiescer)

Je ne lui ai pas laissé le temps de continuer la discussion. J’ai mis mes écouteurs. Je me délectais du morceau « feel this moment » de Pitbull feat Christina Aguilera, puis « feeling myself » de Will _I_Am feat Miley Cyrus au rythme des secousses du bus traversant la ville de Bafilo lorsque je fermai les yeux pour je ne sais combien de temps. Brusquement, j’ouvris les yeux parce qu’elle me tapait l’épaule pour me dire qu’on est arrivé.

15 h 5, descente du bus à Kara.
Pendant que je cherchais mon sac, Octavia vint vers moi.

Elle : c’est bien toi ? Wow !
Moi : c’est La Plume parlante en personne.
Elle : on peut échanger nos contacts ? J’adore lire toi, Roland, Edem, Aphtal, Renaud, Cédric, Cyrille et David.
Moi : excellent.
Elle : et l’autre là Salaud quelque chose. Tu le connais ?
Moi : Salaud lumineux ? Wence ? C’est un pote.

Puis je lui rendis ma carte de visite. Elle fixa la carte et m’apostropha.

Elle : community manager ? Qu’est-ce que c’est ?
Moi : appelle-moi. On en parlera autour d’un dîner.
Elle : je t’appelle dès que je rentre. Je t’appelle hein… Okay ?
Moi : au plaisir !
Elle : à toute à l’heure.

Pendant que je cherchais un visage responsable parmi la horde de zémidjan qui m’envahissait, l’autre gars couru vers moi.

Lui : djo, comment tu as fait ?
Moi : gars, on ne drague pas une fille comme on mange la canne à sucre. Il faut y aller avec une délicatesse aiguë, une indifférence momentanée, un diktat marquant et un tact pointilleux.
Lui : noooooooooon, djo tu es trop fort.
Moi : seul Dieu est fort.

Je montai sur un zem. Puis, je remis mes écouteurs qui me servaient « m’kpayé » de Snaky da future.

Bien à vous !

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